Syrie: Alep continue d'être évacué sur fond de tensions persistantes
Syrie: Alep continue d'être évacué sur fond de tensions persistantes

Le calvaire des habitants d’Alep touche-t-il à sa fin ? Un accord conclu par la Russie et la Turquie, et confirmé par Damas et Washington, est entré en vigueur mardi 13 décembre 2016. Il prévoit l’évacuation des rebelles et des civils qui souhaitent quitter la ville. Première étape de l’accord : un cessez-le-feu est entré en vigueur. Moscou prévient cependant cependant que la « résistance » des derniers rebelles d'Alep durera encore « deux-trois jours ».
Pour la première fois depuis le 15 novembre, les habitants d’Alep ont passé une nuit relativement calme, explique Paul Khalifeh, notre correspondant dans la région. L’armée syrienne et ses alliés ont suspendu les grandes opérations militaires mardi 13 décembre vers 18 h. Ils auraient également suspendu les bombardements et les raids aériens, qui visaient Alep-Est sans interruption depuis un mois.
Quelques rafales d’armes automatiques et des tirs isolés de snipers ont été entendus durant la nuit. Des bombardements auraient été entendus ce mercredi matin, la Russie affirmant que des attaques rebelles ont été repoussées par l'armée syrienne, qui poursuit ses opérations pour écraser les dernières poches de résistance.
Elia Kajamini, qui habite Alep-Ouest, explique au micro de Sami Boukhelifa, du service international de RFI, que la partie pro-régime d’Alep vivait aussi le calvaire ces dernières semaines :
« Pour la première fois, on s’est endormi sans la crainte d’être ciblés par des tirs. Nous aussi, dans les quartiers pro-gouvernement à Alep-Ouest, on était ciblés. Chaque jour, il y a avait une quinzaine de morts. Les rebelles tiraient des roquettes contre nos quartiers. Ils pouvaient nous atteindre alors qu’ils se trouvaient, à 10, 12 ou 25 km. »

Les opérations de secours ont commencé
Le calme relatif a permis de secourir des blessés bloqués par les combats parfois depuis plusieurs jours, dans le réduit de deux kilomètres carrés, où étaient retranchés les derniers rebelles et des milliers de civils.
Des blessés ont déjà été transportés à l’aube vers la partie ouest de la ville. Les rebelles pourront emporter leurs armes individuelles, mais ils devront laisser sur place l’armement lourd et les véhicules militaires. Des dizaines de bus attendent depuis des heures dans la région de Ramoussa, à l’extrême sud-est d’Alep.
La Russie affirme mercredi que 6 000 civils et 366 rebelles ont quitté la ville ces dernières 24 heures. A la télévision russe, on évoque de façon assez hollywoodienne la libération d’Alep et l’aide apportée à la population. On parle de six tonnes d’aide humanitaire arrivées sur place. Un correspondant parle aussi des actes commis sur place par « des terroristes ».
La plupart des insurgés iront dans la localité d’Atareb, non loin de la frontière avec la Turquie, selon des sources informées. Les civils qui souhaitent rester dans la ville seront pris en charge par le Croissant-Rouge syrien et les organismes étatiques. Leur nombre exact n’est pas connu, mais il serait nettement inférieur au nombre de 100 000 avancé mardi par certaines sources internationales.
La Russie aux manettes de l’accord de cessez-le-feu
L’opération a pris du retard à cause du gouvernement syrien, qui semble mécontent d’avoir été marginalisé lors des négociations. Le représentant de Damas aux Nations unies, Bachar al-Jaafari, a d’ailleurs clairement dit, mercredi matin, lors d’une déclaration à la chaine panarabe al-Mayadeen, que tout accord doit passer par le gouvernement syrien.
Car ces négociations ont été menées par les Russes, rapporte Etienne Bouche, notre correspondant à Moscou. C’est Vitali Tchourkine, l’ambassadeur russe aux Nations unies, qui avait confirmé qu’un accord avait été conclu avec le gouvernement syrien sous la houlette de la Russie et de la Turquie. Cet accord avait d’abord été annoncé par des sources rebelles.
Incontestablement, c’est la Russie qui est aux manettes dans cette opération qui, si elle aboutit, sera considérée comme un tournant. Elle marquera la fin de quatre ans d’insurrection dans cette ville, où le soutien de la Russie a été déterminant. Moscou a trouvé un terrain d’entente avec Ankara, qui soutient le camp adverse.
Certains experts s’interrogent sur la stratégie que suivra désormais Moscou : si le pouvoir russe souhaite effectivement un règlement politique du conflit, il ne pourra pas combattre éternellement aux côtés de Bachar el-Assad.
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